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Rurouni Kenshin : Seisou Hen

   Ce dossier a pour but de mettre en valeur quelques aspects très intéressants des OAVs Seisou Hen, conclusion de la saga Rurouni Kenshin. Il ne s’agit que d’observations d’un fan, et de réflexions suite à des discussions avec d’autres fans.
   Pour rappel, Seisou Hen est une série de deux OAVs, se déroulant environ 14 ans après l’épilogue du manga, qui s’achevait par la remise du sabre à lame inversée à Yahiko. Seisou Hen est à la fois une synthèse et un épilogue, mais également la fin d’une ère. Avant toute chose, je déconseille fortement de lire ce dossier si vous n’avez pas vus les OAVs en question, apprendre certaines infos pourrait vous gâcher le plaisir d’un visionnage futur.
   Une des plus grandes qualités de ces OAVs est la profondeur symbolique que l’on peut percevoir dans nombre de scènes. D’après ce que j’ai pu lire sur certains forums, dans diverses langues, il semblerait que cette dimension ait totalement échappé à la plupart des fans de Kenshin. Ceux qui appréciaient les combats ou l’humour de la série, ou l’ambiance sombre de Tsuioku Hen (les premiers OAVs) ont été totalement déçus par ces OAVs, probablement parce qu’ils n’en ont pas saisi l’essence. Dans ce dossier, je vais tâcher d’éclairer certains aspects qui me sont apparus, ou que d’autres fans ont pu relever. Les propos que je tiens dans ce dossier sont les observations d’un fan comme un autre, sans culture particulière du Japon de la fin du 19ème siècle, et il se peut que d’autres fans aient perçu ces OAVs de manière totalement différente. Sachez que je serai le premier ravi d’en parler sur le forum.
   Là où les premiers OAVs (Tsuioku Hen) se démarquaient par leur ambiance sombre et la série / le manga par ses combats et son humour, Seisou Hen tape dans un autre registre, de manière tout aussi subtile. Je vais, dans cette première partie, aborder brièvement quelques élément et scènes clés. D’autres aspects symboliques seront abordés plus tard, notamment concernant les relations entre personnages.

I/ La Symbolique
  • Continuité des thèmes
  • L'épilogue de la sage
  • La nouvelle génération
II/ Relations entre les personnages (bientôt)
  • Kenshin & Kaoru : le couple égoïste
  • Kenji & Yahiko : le fils et l'héritier
  • Autres personnages : le Kenshingumi (Sano, Megumi, Hiko)
III/ L'achèvement d'une ère (bientôt)
  • De Tsuioku Hen à Seisou Hen
  • La fin du Hiten Mitsurugi Ryu
  • La disparition de Battosaï, la mort de Kenshin Himura, le retour de Shinta

  • Continuité des thèmes

   Seisou Hen constitue un épilogue à toute la saga Kenshin, et en se sens la toute première scène en fait la synthèse. On y voit Kenshin, éternel solitaire, assis sur un cargo assailli par la tempête. Un marin est soudain renversé par une vague et passe par-dessus bord, mais Kenshin est là pour le rattraper et le tirer d’affaire, fidèle à son côté Grand Sauveur. Et voilà que notre vagabond, après avoir remonté le marin, passe à son tour le bastingage et tombe à l’eau. Cette scène, qui peut paraître anodine (surtout avec ma manière de raconter…) représente en fait toute la vie qu’a vécue Kenshin après la fin du Bakumatsu. Toujours le premier à sauver les autres, mais aux dépens de sa propre vie. Kenshin s’est battu toute sa vie mais n’a jamais pris soin de lui, et cet exemple et flagrant : sauver un marin pour passer par-dessus bord à son tour.
   Seisou Hen permet également de faire le bilan de la trace que Kenshin a laissé derrière lui. Himura a sauvé nombre d’innocents, sauvé le Japon (voire le monde) de la menace de Makoto Shishio, mais d’un point du vue plus personnel, il a totalement bouleversé le destin d’êtres bien particuliers. Prenons l’exemple de Kaoru Kamiya, jeune fille courageuse, mais qui n’aurait pas su seule défendre l’honneur et l’avenir du dojo de son père. Kenshin est entré dans sa vie de manière soudaine mais finalement très naturelle, et le couple s’est formé naturellement au fil du temps. Cependant, Kaoru n’est pas celle dont la vie a été le plus radicalement changée. Prenons des cas plus flagrants comme Sanosuké Sagara, bagarreur aigri devenu ami fidèle et compagnon efficace dans les combats. Megumi Takani, prise au piège d’un trafiquant d’opium, reconvertie en médecin respecté. Yahiko Myojin, pickpocket orphelin, qui deviendra ni plus ni moins que le plus grand samouraï du début du 20ème siècle. Aoshi Shinomori, ramené du « Côté Obscur » par son adversaire, ou encore Sojiro Seta, qui ne commencera à vivre réellement qu’après avoir encaissé un Dragon Divin… Même Hiko Seijuro perçoit l’influence de Kenshin sur ce monde, lorsqu’il constate l’attitude de Yahiko suite à sa victoire face à Kenji : « On dirait que mon stupide disciple a même réussi à changer l’idéal du sabre. »
   Cet aspect de bouleversement de la vie des gens, passant par un combat psychologique et décisif, a dès le départ été l’une des grandes marques de fabrique de la série. Cela ne vient pas que de Kenshin, mais aussi entre autres de Sano avec Anji (pour moi l’un des passages les plus poignants de la saga). Seisou Hen s’inscrit dans la continuité des thèmes du manga, et l’on passe par la traditionnelle étape du « combat – pardon – rédemption » avec l’opposition Yahiko – Kenji, sur laquelle je reviendrai plus en détails par la suite. Tous ces « miracles » qu’a faits Kenshin sur son passage sont rappelés par les dernières paroles prononcées par Sano sur l’ensemble de la saga. Le meilleur ami de Kenshin résume bien les choses, avec sa classe habituelle. Après avoir dit un « adieu » franc (Sano sait qu’il ne reverra jamais son ami…) à Kenshin, Sano regarde le bateau partir du port de Shanghaï et répond en pensée aux remerciements de Kenshin : «  C’est moi qui aurais dû te remercier. Tu m’as fait changer. Ainsi que tout le monde. » Les anonymes que Kenshin a protégés ne garderont pas en mémoire le nom de Kenshin Himura, tandis que les victimes de Battosaï eux n’oublieront pas. Mais dans le cœur de ceux qui l’ont connus, Kenshin aura été un modèle à suivre et un symbole de courage, de compassion et de dévouement.

Kamiya Kaoru

   Je ne développerai pas réellement l’aspect de la « Voie » de Kenshin, de la réponse qu’il trouve au terme de son combat contre Enishi. Le sujet est certes traité dans Seisou Hen, mais ce n’est ni plus ni moins que la reprise de la fin du manga, tome 28, et donc il ne s’agit pas d’une réflexion propre à Seisou Hen. Malgré tout ; les OAVs vont un peu plus loin avec l’expiation finale de Kenshin à la toute fin, et j’en reparlerai dans la troisième partie de ce dossier. Une petite précision au passage, Seisou Hen a différentes traductions assez proche : « Chapitre de l’Expiation » ou « Chapitre de la Purification », il y a d’autres versions mais je ne les connais pas toutes. En anglais, le titre « Reflections » a été donné aux OAVs.
  • L'épilogue de la sage

   Pour approfondir cet aspect « synthèse » de Seisou Hen, il faut observer le choix des flashbacks tout au long de l’histoire. On peut certes regretter l’abondance de ces flashbacks, aux dépens de passages inédits qui sont, pour moi, les plus intéressants. Quoiqu’il en soit, la sélection des retours en arrière n’a pas été fait au hasard et s’inscrit dans les thèmes que les auteurs ont voulu faire passer. Evidemment, la grande majorité des flashbacks concerne la relation Kenshin / Kaoru, puisqu’il s’agit là d’un axe central de Seisou Hen. De la même manière, on a droit à des flashbacks concernant Yahiko et Sano, puisque leur relation avec Kenshin est également un point central de l’histoire. J’y reviendrai dans la partie sur les relations inter-personnages.

Udo Jinné

   Ainsi, les deux seuls combats qui aient été reproduits sont des combats clés, non pas pour l’avancement de l’histoire (auquel cas on aurait plutôt eu les combats contre Saïto et Shishio) mais pour leur puissance symbolique et leur lien avec le propos des OAVs. Le duel Kenshin vs. Jinné a été reproduit (et avec panache) pour souligner la menace omniprésente d’un retour de Battosaï, mais surtout le fait que la seule et unique personne capable de l’empêcher est Kaoru, qui passe outre l’hypnose du Chapeau Noir pour crier un « Non !» qui stoppe Kenshin net. Cette scène est très forte, elle montre combien, dès le début de la série, Kaoru a une influence sur les émotions de Kenshin. Le duel a été simplifié (pas de double batto final, aucun détail sur l’hypnose de Jinné), puisque l’important ce ne sont pas les coups qui sont portés, mais leur signification. De la même manière, les derniers mots de Jinné sont capitaux, lorsqu’il assure à Kenshin que l’assassin en lui vivra toujours. On sait tous que Battosaï n’est jamais revenu, mais le vrai sens des paroles de Jinné est, à mon sens, celui-ci : la rédemption ne viendra jamais pour Battosaï, et comme il restera toujours Battosaï au fond de lui, pas de rédemption non plus pour Kenshin Himura. Nous verrons en fin de dossier que seul Shinta Himura finira par trouver le chemin de la rédemption.
   En ce qui concerne le combat avec Enishi, plus long et développé, son choix paraît assez évident. Cela constitue une suite directe au dénouement de Tsuioku Hen, et de nombreux parallèles sont faits : la plage de sable qui se transforme, dans l’esprit des deux adversaires, en cette forêt enneigée où l’un a perdu sa femme et l’autre sa sœur. Également cette scène très poignante où Enishi veut achever Kenshin et voit en Kaoru la silhouette protectrice de sa sœur, et c’est à ce moment seulement qu’Enishi s’effondre. Tsuioku Hen constituait le prologue de la saga, Seisou Hen son épilogue, et il est intéressant de voir de tels liens entre les deux. Bien sûr, le fait que la période Jinchuu n’ait jamais été adaptée en animé a dû favoriser le choix de ce combat clé. L’opposition Kenshin / Enishi étant le seul point intéressant de ce cycle selon moi, on peut se dire que le meilleur morceau a finalement été animé, et avec les moyens bien meilleurs d’OAVs et non pas d’une série. 

Yukishiro Enishi

  • La nouvelle génération

   Le début de l’ère Meiji a marqué la fin de l’ère du sabre dans tout le Japon, et ce fait a maintes fois été traité dans le manga (notamment dans le cycle mettant en scène Raijuta). Cependant, la nouvelle génération nous est présentée avec une certaine note d’espoir, et suit en ce sens la voie de l’épilogue du manga par Watsuki. Je vous parle de Yahiko Myojin, digne successeur de Kenshin, homme d’épée brillant. J’ai eu la sensation que Yahiko était le reflet de Kenshin mais sans l’ombre de Battosaï. Il a le sabre à lame inversée, une puissance extraordinaire, un grand charisme, l’influence de gens exceptionnels tels que Kaoru, Kenshin, Sano (sa famille au final ; deux parents et un grand frère) mais sans le lourd passé et les erreurs d’Himura. Il est ce qu’aurait pu être Kenshin s’il n’avait pas vécu les troubles du Bakumatsu.

Myojin Yahiko

   Malgré tout, la relève n’est pas entièrement positive. Kenji Himura est apparu pour la première fois dans le manga, où Watsuki case avec humour un « il adore sa maman » et « il n’aime pas du tout son papa ». Cette petite boutade peut paraître très amusante quand Kenji a deux ans, mais dans Seisou Hen, c’est tout de suite beaucoup moins drôle. Dès sa toute première apparition, on voit d’emblée que Kenji ne porte pas son père dans son cœur. Il souhaite apprendre le Hiten Mitsurugi Ryu pour égaler le grand Battosaï, mais semble mépriser l’homme qu’est Kenshin Himura. Tout l’inverse de Yahiko en fait… Là où Yahiko est un adulte qui a vécu de grands combats auprès de Kenshin, Kenji est un gamin arrogant, ébloui par les exploits d’un assassin d’une époque révolue. Cela donnera lieu à l’une des plus belles scènes de toute la saga Kenshin : l’affrontement entre Kenji et Yahiko (qui semblent bien se connaître, logique si Kenji a grandi dans le dojo Kamiya dont Yahiko est devenu le maître adjoint). On peut regretter que le combat soit si court, mais là encore c’est sa signification qu’il faut retenir. En quelque sorte, ce duel oppose le sabre à lame inversée (la voie de Kenshin Himura) au Hiten Mitsurugi Ryu (la voie de Battosaï l’Assassin), et Yahiko fait une brillante démonstration en infligeant à son jeune ami une cinglante défaite qui, espérons le, lui restera en mémoire. Il lui prouve qu’un sabre de pacifiste qui protège les gens n’est en aucun cas celui d’un faible, et combien la cause qu’il a servie l’a rendue fort. On retrouve le thème de la Cause, plusieurs fois abordé au cours de la saga.
   On ignore si, par la suite, Kenji se mettra enfin à respecter le style Kamiya Kasshin et réfléchira à la Cause et au fait de donner la mort, mais une chose est sûre : Hiko Seijuro, spectateur de la scène, a pour sa part retenu la leçon. C’est lui qui, au fil des ans, a vu évoluer son « stupide disciple », l’a vu utiliser sa technique de sabre d’une manière complètement inédite. Mais il a également vu le danger que représente la puissance entre les mains d’un homme. Il le dit en ces termes « La puissance a tendance à nous mener vers des combats qui ne sont pas les nôtres. Et l’on en souffre toute sa vie. Je l’ai fait. Il l’a fait». Il a vu le « Côté Obscur » du Hiten Mitsurugi Ryu s’emparer de Kenshin et en faire un assassin, et il voit à présent sur quelles traces son fils Kenji, un véritable génie, est en train de s’engager. Dans Tsuioku Hen, Hiko avait dit à Kenshin qu’un jour, ils boiraient le saké ensemble. Dans Seisou Hen, c’est à Yahiko qu’il vient servir à boire, lors de cette superbe scène au clair de lune, où il révèle à Yahiko que le Hiten Mitsurugi Ryu mourra avec lui, sous-entendant que Kenji ne connaîtra jamais l’arcane suprême et tous les secrets de la technique. Hiko fait ainsi le choix du sacrifice pour préserver l’avenir. Au final, Yahiko suivra sa voie et Kenji sera bridé (quelle sera sa réaction en l’apprenant ?), et le futur Japon comptera dans ses rangs un nouveau Kenshin Himura, mais aucun nouveau Battosaï. Kenshin le sait, l’a voulu et en a fait ainsi dès les premiers instants de sa rencontre avec Yahiko.

Himura Kenji

&

Seijuro Hiko

   Petite anecdote : beaucoup de gens reprochent aux créateurs de Seisou Hen le rôle assez ambigu donné à Kenji. Je suggère de lire attentivement le « mot de la fin » dans le tome 28 du manga, où l’on voit que cette opposition Yahiko – Kenji est en fait tirée d’une idée de Watsuki, qui prévoyait de faire s’affronter Kenji et le fils de Yahiko et Tsubamé, dans un duel avec pour enjeu le sabre à lame inversée que Kenji exige de récupérer. On retiendra également que Watsuki avait prévu de faire de Kenji un personnage bien plus noir (celui de Seisou Hen restant tout de même sympathique, surtout à la fin), « tordu comme Saïto et égoïste comme Shishio » selon ses propres termes.

A suivre...

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